Ces "clauses de silence" qui "bâillonnent" les journalistes
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Ces "clauses de silence" qui "bâillonnent" les journalistes

Quand Bolloré arrive, on ne peut plus rien dire

À Canal+, iTélé, le groupe Prisma, Europe 1, "Paris Match" et récemment le "JDD"... Dans chaque nouveau média "bollorisé", la pratique est la même : les journalistes souhaitant quitter l'aventure se voient imposer la signature d'une clause de confidentialité. Zoom sur cet "achat de silence" qui concerne désormais plusieurs centaines de journalistes en France.

En quittant le JDD après une grève de quarante jours, les journalistes qui s'étaient battus cet été pour que le quotidien dominical ne devienne pas un journal raciste, sexiste et homophobe sous la direction de Geoffroy Lejeune ont dû signer un document légal bien connu de leurs collègues d'autres médias "bollorisés" – et d'autres médias tout court. Ce document ? Une clause de confidentialité. 

"Je ne souhaite pas m'exprimer sur ce sujet dans le moment présent, répond à Arrêt sur images un journaliste ayant récemment quitté le JDD. Mais il est très intéressant." Difficile pour ASI de trouver des journalistes disposé·es à discuter de ces clauses, dont le principe même est de faire peur et donc de faire taire, bien au-delà de la fin du contrat. Les souvenirs sont douloureux, et la menace toujours présente. Un·e ancien·ne d'Europe 1, nous dit-on, ne nous parlera pas, "toujours traumatisé·e" par cet épisode. Un ancien salarié d'iTélé refuse de nous répondre en invoquant "ne pas souhaiter aborder le sujet". La petite dizaine de journalistes ayant accepté de nous parler a requis l'anonymat, voire l'absence de mention claire de leur ancien média. "Je n'ai aucun intérêt à vous répondre", explique l'un·e d'entre eux. "En vous parlant, on s'expose à un coup de fil d'avocats."

Une généralisation dans les médias "bollorisés"

Des clauses de confidentialité, nombreux sont les contrats de travail à en contenir, et pas seulement dans le secteur des médias : elle souligne généralement que le salarié s'engage à ne pas dévoiler des informations confidentielles sur son ancien employeur. Chez ASI, les contrats indiquent que le ou la salarié·e "s'engage formellement à ne divulguer à qui que ce soit, tant pendant l'exécution du contrat de travail qu'après sa fin, et pour quelque cause que ce soit, aucun des documents, […] étudiés dans la société, se déclarant à cet égard liée par le secret professionnel". Que d'ancien·nes salarié·es d'une entreprise s'engagent à ne pas emporter, reproduire ou publier des documents confidentiels n'a rien d'exceptionnel dans le cadre d'un contrat de travail. 

Mais depuis 2015 et la mainmise de Vincent Bolloré sur le groupe Canal+, puis les vagues successives de "bollorisation" à iTélé, dans les médias du groupe Prisma racheté par Vivendi, puis encore ceux du groupe Lagardère (Europe 1, Paris Match et récemment le JDD), des clauses de confidentialité, parfois aussi dites clauses de loyauté ou de non-dénigrement, sont souvent imposées comme condition sine qua non au départ généralisé de journalistes opposés à l'arrivée du nouvel actionnaire. Et ce sont des rédactions entières qui, en partant à marche plus ou moins forcée, se retrouvent muselées : impossible, sans violer l'accord de départ, de critiquer la façon dont l'industriel breton a fait le ménage dans leur ancien média.

Au JDD, à l'été 2023, le collectif a négocié un "accord de sortie de crise" qui devrait permettre de quitter le journal à 90 % de la rédaction préexistante à l'arrivée de Geoffroy Lejeune. En échange des indemnités de départ, une clause "d'obligation de confidentialité et de loyauté", nous indique un·e journaliste qui l'a signée comme ses collègues. Libération et Mediapart l'écrivaient en août : "La direction de Lagardère news a insisté, au dernier moment, pour glisser dans l'accord de fin de conflit une clause de confidentialité et de loyauté, qui contraint les journalistes sur le départ à s'exprimer anonymement dans la presse." Les journalistes grévistes du JDD nous indiquent s'être battus sur un point : la garantie de la "liberté d'expression du salarié" dans leur clause de confidentialité. "La «liberté d'expression du salarié», on l'a obtenue noir sur blanc, c'est nous qui l'avons ajouté", précise un·e journaliste sur le départ. "On n'est pas les premiers, à signer ce genre de clause, avec l'arrivée de Bolloré."

En effet : dès la grève à iTélé, en 2016, qui s'est soldée par le départ de l'immense majorité de la rédaction et la création de CNews sur les cendres de la chaîne d'info, les journalistes s'étaient vus imposer une clause de confidentialité qu'ASI a pu consulter. Elle précisait que l'ex-salarié "s'engage à ne rien dire, suggérer ou entreprendre qui puisse porter atteinte à l'image ou à la considération de la Société et des sociétés du groupe Canal + et / ou des dirigeants et / ou des salariés de celle-ci", et "s'engage de façon générale à n'entreprendre aucune démarche ou action déloyale à l'égard de la Société et des sociétés du groupe Canal +"

À Europe 1, 70 journalistes ont quitté la rédaction à l'issue de leur grève contre la prise de pouvoir sur le groupe Lagardère par le groupe en 2021. Chacun·e de ces 70 journalistes a, selon nos informations, dû signer une clause de confidentialité stipulant que "tout salarié quittant l'entreprise s'engage à ne rien révéler de la situation interne du média qui ne soit déjà connu du public ainsi qu'à ne pas dénigrer ni nuire à la réputation de l'entreprise quittée, ses dirigeants et les salariés restants". À Prisma, une lettre envoyée aux journalistes qui prenaient leur clause de cession, ouverte suite au rachat par Vivendi, précisait : "Nous vous rappelons que, conformément à votre contrat de travail, vous êtes soumis à la clause de discrétion concernant vos activités au sein de Prisma media."

Nombre de journalistes de la rédaction de Paris Match ont aussi signé une clause de confidentialité. Celle-ci indique que les salarié·es s'engagent à "ne porter aucune atteinte aux intérêts, à la réputation, à l'image" du groupe Lagardère, "au travers de propos, de déclarations ou d'actes", et ce "ni directement ni indirectement". Selon nos informations, certain·es journalistes de Match ont pu négocier l'insertion d'une clause leur assurant de "pouvoir continuer à faire leur métier de journaliste", ce qui réduit théoriquement le champ de l'interdiction : un travail journalistique sur l'actionnaire reste envisageable. Mais en l'absence d'une clause de cession, à Match, chaque journaliste a négocié ses propres termes de départ, et peu ont pu introduire une telle protection.

Avec toutes les acquisitions récentes de Vincent Bolloré dans le secteur des médias, "on ne peut plus critiquer grand monde !", rit jaune un·e ancien·ne d'i-Télé. Et à force, renchérit un·e autre, "ça fait un certain nombre de journalistes" qui, ayant dû quitter leur rédaction bollorisée, ne peuvent plus s'exprimer sur Bolloré. "C'est un scandale, ces clauses, abonde un troisième journaliste. C'est quand même un énorme problème, d'acheter le silence de tous les collaborateurs que [Bolloré] écrabouille."

"Le but, c'est de faire peur pour silencier préemptivement"

Tous et toutes s'accordent : ces clauses ont pour but premier d'effrayer. La menace d'un potentiel procès pour non-respect de clause de confidentialité est la seule raison du silence des ancien·nes salarié·es. Le métier de journaliste entre pourtant en conflit frontal avec ces restrictions : un journaliste, ça discute, ça échange des infos, ça les publie. Mais sur ce sujet, beaucoup s'autocensurent par précaution. Pour un·e ancienne d'iTélé, ces clauses "imposent le silence"Au JDD, on nous décrit des "collègues hyper-flippés par cette clause", qui vont jusqu'à ne plus oser "parler en public, même à la terrasse d'un café", de peur d'être entendus. "Ça marche sur pas mal de gens, ça inquiète, nous dit-on. Le but, c'est de faire peur pour silencier préemptivement. Ça peut être une façon de bâillonner les gens." D'autant plus que ces clauses contiennent des concepts de "loyauté" ou de "non-dénigrement" dont l'absence de définition entretient la prudence. Et donc le silence : "Être loyal, c'est très vague, comme notion. L'obligation de ne pas diffamer, ça, c'est la loi, mais l'idée de dénigrer, c'est un peu plus flou." 

Chez Europe 1, les journalistes s'étaient largement exprimé·es dans les médias pendant les quatre semaines de grève. Une parole bien plus libre, et un bouclier par la suite : "Ça nous a protégés, explique l'un·e d'eux. Ce qu'on avait déjà dit pendant la grève, on a pu le redire sans se mettre en faute vis-à-vis de cette clause, puisque ces éléments sont déjà dans le domaine public." On nous cite par exemple la série des Jours sur Lagardère, avec une douzaine d'épisodes relatant la grève à la radio. Ces articles regorgent de détails sur les coulisses du bras de fer et servent désormais de "parapluie" pour tous les journalistes ayant quitté Europe 1, "même ceux qui ne s'étaient pas exprimés à ce moment-là". 

"C'était délibéré de s'exprimer au moment de la grève pour porter le débat sur la place publique, et ça permet à ceux qui partent de continuer à s'exprimer sur les sujets en question", souffle un·e ex-journaliste de la radio. Les ancien·nes d'Europe 1 considèrent qu'il s'agit du "meilleur conseil que l'on puisse donner" à une rédaction qui verrait le tsunami bolloréen arriver dans sa direction. Un avis partagé par les anciens du JDD, dont certain·es considèrent que "cette clause ne [les] contraint pas tant que ça" par ailleurs : "Tout ce qui est déjà paru dans la presse, on peut le réutiliser." Mais l'astuce a ses limites. "Il y a des choses que je n'ai pas pu dire car je risquais de me mettre en faute par rapport à cette clause, se souvient un ancien du groupe Lagardère. Je ne pourrai jamais les dire."

Dans les médias du groupe Lagardère, dont le rachat par le Vivendi de Bolloré n'a pas encore reçu le feu vert de la Commission européenne, le flou artistique autour de la figure du dirigeant a également bénéficié à l'équipe d'Europe 1. S'il n'est pas permis aux ancien·nes de critiquer Arnaud Lagardère, toujours officiellement le patron, cette mesure ne s'applique pas pour Vincent Bolloré. "Il n'est pas encore patron du groupe Lagardère, puisque l'OPA n'est pas encore validée", explique à ASI Olivier Samain, qui était journaliste et délégué syndical SNJ à Europe 1 pendant la grève de la radio. "Juridiquement, on n'a donc rien à voir avec Bolloré. Et si jamais Bolloré venait nous demander des comptes, on pourrait lui répondre : «Donc, vous vous considérez déjà comme le patron, alors que vous affirmez l'inverse à Bruxelles ?»" Lorsque le rachat de Lagardère par Vivendi sera effectif, la clause, qui ne nomme pas la "direction du groupe Lagardère" que les signataires ne doivent pas dénigrer, s'appliquera-t-elle également à Vincent Bolloré ? Un journaliste s'interroge : "Est-ce que les dirigeants que l'on ne doit pas dénigrer sont les dirigeants au moment où l'on est parti de la boîte, ou est-ce que ça vaut pour leurs successeurs éventuels ?" Sur ce point, ni les ancien·nes d'Europe 1, ni les autres, n'ont de réponse claire.

Patrick Cohen a reçu un "coup de fil des avocats de Lagardère"

Durant la grève à Europe 1 en 2021, le journaliste Patrick Cohen n'avait pas mâché ses mots contre la direction du groupe Lagardère : lors d'une assemblée générale des grévistes, le présentateur d'Europe midi avait déclaré, selon le Parisien : "En 35 ans de radio, je n'ai jamais connu un tel niveau d'humiliation et de violence pour les équipes éditoriales." Reparti à Radio France (qu'il a quitté depuis) après avoir, comme ses collègues ayant préféré s'en aller, signé la clause de confidentialité du groupe Lagardère, Patrick Cohen n'est pas resté silencieux. En mars 2023, lorsque les Sociétés des journalistes (SDJ) de Paris Match et du JDD, lauréates du Grand Prix Michèle Leridon aux Assises du journalisme de Tours, ont décliné l'invitation "par peur de représailles" du groupe de Bolloré – car le prix se voulait un soutien clair à leur combat contre la prise de pouvoir de l'actionnaire –, Patrick Cohen s'était avancé sur scène. Regrettant l'absence des lauréates, il avait dénoncé "un actionnariat prédateur qui préfère détruire ce qu'il n'arrive pas à contrôler".

Cohen a ensuite écrit un texte en soutien aux grévistes du JDD sur Twitter : "Par son obstination inepte et ruineuse, votre actionnaire démontre le caractère purement idéologique de son projet." Des mots qui lui ont "valu un coup de fil au milieu de l'été de la part des avocats de Lagardère, pour [lui] rappeler [s]es engagements", a confirmé Patrick Cohen à ASI. L'information avait été dévoilée par les Jours : "La mésaventure de Patrick Cohen a largement circulé chez les ex-grévistes, contribuant à une légitime paranoïa […]. Comme toujours avec Bolloré, l'important, c'est la terreur."

"Est-ce qu'on nous bâillonne jusqu'à la fin de nos jours ?"

Pour Patrick Cohen, la question des clauses comporte "un débat juridique", dit-il à ASI "Parce que si on prend ces clauses à la lettre, est-ce que cela voudrait dire qu'on interdit à vie, à perpétuité, à des journalistes de commenter des actes publics du groupe auquel ils ont appartenu ? Est-ce qu'on nous bâillonne jusqu'à la fin de nos jours ?" Le code du travail (article L1121-1) précise pourtant que "nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché". Une clause de confidentialité telle que celles imposées aux journalistes des médias "bollorisés", sans proportion ni limite dans le temps, pourrait être jugée comme contrevenant à la liberté d'expression des salariés. 

Cette question de la temporalité, Patrick Cohen est loin d'être seul à se la poser. "Je me suis demandé «Est-ce que c'est pour la vie ? Potentiellement, jusqu'à ma mort, je n'ai pas le droit de critiquer le groupe Bolloré ?», se souvient un·e ex-journaliste d'iTélé. Ça me paraît complètement dingue, ce serait une atteinte directe à la liberté d'expression." Plusieurs journalistes ayant quitté les médias mentionnés ci-dessus avouent réfléchir deux fois avant de partager ne serait-ce qu'un tweet. Et souvent, y renoncer. D'autres racontent avoir fait "hyper gaffe" à ce qu'ils et elles disaient au début, et avoir depuis relâché quelque peu la pression. "Il y a toujours une petite voix qui me dit : «Fais attention», reconnaît un ancien du groupe Canal. Évidemment qu'il y a une petite autocensure, on met un peu d'eau dans son vin." Auprès d'ASI, ces clauses de confidentialité sont comparées à "une puissance étatique qui disposerait de l'arme nucléaire" : la force de dissuasion, même ténue, existe.

"C'est un achat de silence"

Lors de la commission d'enquête sur la concentration des médias, son rapporteur, le sénateur David Assouline, avait pris la mesure du silence imposé par ces clauses aux anciens journalistes des médias bollorisés. "Ce que vous nous dites, même si je ne suis pas naïf, me glace, déclarait-il face à Olivier Samain, journaliste d'Europe 1 qu'il auditionnait. Dans notre démocratie, devant une commission parlementaire, vous pouvez craindre de nous communiquer des informations et vous pensez que des éléments peuvent être cachés parce qu'une clause de silence vous interdit de mettre en difficulté l'actionnaire d'Europe 1." Contacté par ASI, Olivier Samain décrit "l'exercice difficile" de son audition au Sénat : "J'ai signé cette fameuse clause, donc c'est un chemin de crête étroit, entre d'un côté le respect des engagements de cette clause, et de l'autre le devoir de répondre aux questions de la commission d'enquête." 

Auprès d'ASI, David Assouline estime que Vincent Bolloré "utilise largement, et très cyniquement" les clauses de confidentialité. "C'est un achat de silence : Bolloré, en plus de se débarrasser des gens, achète leur silence." Le sénateur affirme avoir été contacté, pendant la commission d'enquête, par d'ancien·nes journalistes qui, ayant signé une clause, lui faisaient part de leur expérience de manière anonyme : "À Europe 1, j'ai eu un témoignage qui n'était pas public, pour me dire «Bolloré a menti [au Sénat], ce qu'il dit n'est pas vrai, il y a bien eu ingérence»." Ce qui désole le sénateur : "Bolloré a le pouvoir d'acheter le fait que même devant la commission d'enquête, ceux qui ont vécu ça ne pouvaient pas venir le dire. Ils ne mentent pas, mais ils ne répondent pas." Les rédactions vidées par l'arrivée de Bolloré, dit-il, a touchait des centaines de personnes". Mais le magnat pouvait venir démentir toutes les critiques face aux sénateurs, "et je ne pouvais pas trouver quelqu'un pour le contredire".

L'ensemble des journalistes à qui ASI a parlé s'interrogent sur la légalité de ces clauses, qui les empêche sans limite de temps de parler de leur expérience au sein de leur ancien média et sa direction. "Je ne sais pas si elles ont une vraie valeur juridique", confie un·e ex-journaliste d'un titre de presse bollorisé. Un autre se souvient que lors de la grève de son média, "[leur] avocat disait que ces clauses ne valaient rien". Une autre encore s'étonne de l'absence de limite sur la temporalité : "Je trouve ça fou." Beaucoup s'interrogent sur la légalité de réduire ainsi la liberté d'expression de centaines de personnes. Pourtant, tous et toutes ont une petite voix dans la tête, celle qui murmure : "Mais est-ce qu'on veut pour autant prendre le risque d'aller le vérifier au tribunal ?"

Jean-Baptiste Rivoire, poursuivi par Bolloré pour une "clause de silence" à Canal+

La totalité des journalistes ayant signé une clause s'inquiètent de recevoir un jour un appel d'un avocat de Lagardère ou de Bolloré, comme celui qu'a reçu Patrick Cohen cet été. Mais à ce jour, un seul journaliste a été poursuivi en justice par son ancien employeur Vincent Bolloré, pour l'avoir critiqué : Jean-Baptiste Rivoire, qui était rédacteur en chef du magazine d'enquête Spécial investigation pour Canal+ jusqu'à l'arrêt de l'émission après le rachat de la chaîne par l'industriel breton.

En 2021, ASI avait pu consulter l'accord de départ qu'avait signé Rivoire en quittant Canal+. Il était écrit que le journaliste doit s'interdire "tout acte ou propos inexact ou diffamatoire (ou pouvant être considéré comme tel) […] nuisible à la réputation […] de la Société et de toutes les sociétés du groupe Canal+/Vivendi ou à celle de leurs dirigeants et/ou préposés". Lorsque Jean-Baptiste Rivoire a pris la parole dans un documentaire de RSF en 2021, Le système B, Canal+ a considéré qu'il violait cet accord. "Je pense qu'ils ont voulu faire un exemple avec moi", suggère-t-il à ASI : "Bolloré m'a attaqué parce que je joue franc jeu." 

Ses avocats, Me William Bourdon et Me Vincent Brengarth, déclaraient en 2021 à ASI  : "Comment concilier l'exigence d'un employeur à l'égard de son salarié avec la liberté d'expression ? […] L'affaire est emblématique d'une instrumentalisation du droit du travail pour faire taire un journaliste. C'est une logique d'intimidation." Ils décrivent la clause qu'a dû signer Rivoire pour quitter Canal+ comme une "clause bâillon". Lui parle de "clause de silence" et poursuit : "Ce qui est pervers, c'est que l'opinion ne le sait pas. Il y a des journalistes dont la parole est tenue, et ils n'ont même pas le droit de dire «Je me tais parce que je me suis engagé à le faire». C'est un énorme problème de transparence démocratique."

L'affaire qui oppose Jean-Baptiste Rivoire à Vincent Bolloré donnera pour la première fois l'occasion à la justice française de se pencher sur la question des clauses de confidentialité que l'on nous décrit comme "imposées systématiquement" aux journalistes qui fuient les médias "bollorisés". L'audience est fixée au 26 octobre prochain. "Entre la crise du JDD et les états généraux de l'information voulus par Macron, qui vont faire que beaucoup de gens vont parler, le contexte politique n'est pas très bon pour Vincent Bolloré", estime l'ancien journaliste de Canal+. Il espère que ses avocats plaideront pour faire de sa situation une "question de principe".

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